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Une communauté d’artistes pour un écoféminisme

Exposition « We are » aux Tanneries d’Amilly

Audrey Terisse et Sammy Engrammer
Audrey Terisse et Sammy Engrammer
Les Tanneries à Amilly en région Centre Val de Loire est un centre d’art dirigé par Eric Degoutte qui organise sa programmation selon de grands cycles. Après Les registres du jeu, s’ouvre un second cycle tourné vers l’approche des récits et les (en)jeux d’une dimension narrative. A côté de la sortie de résidence de Natalia Jaime-Cortez la grande halle accueille l’exposition collective « We Are » dans un commissariat de Sammy Engramer et Guillaume Lasserre.

Voir en ligne : www.lestanneries.fr

Le lieu reçoit régulièrement des artistes en résidence, récemment Natalia Jaime-Cortez (née en 1983) y a produit À combien de pas dormez-vous de l’eau ? Elle développe depuis maintenant plusieurs années une longue conversation entre elle et de très simples matériaux du monde : le charbon, l’encre et ici l’eau … Sous la verrière elle expose ses installations de tissus colorés évoquant les mouvements du courant. Une création sonore de peu d’amplitude accompagne ces accrochages sensuels . Dans la petite galerie des oeuvres sur papier de petit format organisent des formes simples révélées au contact de l’eau .

Guillaume Lasserre, historien de l’art de formation avec un tropisme pour la photographie, est aussi passionné de théâtre et de danse, Ancien directeur du Pavillon Vendôme - Centre d’art contemporain, il collabore à Zérodeux / 02, et anime Un certain regard sur la culture pour le Club de Mediapart. Sammy Engramer diplômé de l’école Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Bourges et d’un post-diplôme à l’école Régionale des Beaux-Arts de Nantes, peintre d’origine, il s’intéresse à la sculpture et à l’objet qu’il met en scène dans des espaces d’exposition. En 2001, il crée le Groupe Laura, association d’artistes et revue d’art contemporain basée à Tours pour laquelle il devient co-directeur et rédacteur.

Ensemble ils organisent pour la grande halle l’exposition chorale We are scénographiant des oeuvres de différentes disciplines créées par onze artistes en parité. Guillaume Lasserre y voit la quête « d’un commun - où être », il en écrit : « A l’aube des espaces intimes ou en lieu et place des espaces publics se détermine un bruissement commun, nourri de la mémoire de formes de pensées ou rêves unitaires ruinés et de la fin des grands récits. » Son complice artiste dynamise la halle avec cinq sculptures monumentales , qu’il revendique comme de « contre-monuments », l’un réactive les barrières Vauban, un bateau à trois coques destiné à tourner en rond est intitulé I would prefer not to selon la célèbre formule de Bartleby. Une étroite et haute prison cellulaire s’affirme comme un possible Monument pour une dictateur. Démesuré Le marteau des sorcières répond à un double affichage d’une bâche opposant Patricapitalisme et Ecoféminisme. Dans sa perspective la bibliothèque d’Audrey Terisse Nous toutes# décompte sur une année les féminicides dont les noms des victimes et leur meurtre sont brodés sur la couverture de romans d’amour à l’eau de rose.

Laure Tixier dont nous avions apprécié les oeuvres à la récente Biennale d’Architecture d’Orléans et de Vierzon présente ici un modèle réduit réalisé en différents bois de la prison de la petite Roquette, reproduit sur l’affiche. Plus loin un hamac suspendu se révèle lourd de la maquette en tissu d’un autre lieu la colonie pénitentiaire de Mettray. Marielle Chabal présente elle aussi un dispositif hexagonal regroupant divers documents iconographiques et textuels créant un ensemble entre storyboard et cartographie mentale pour l’approche d’une utopie.

Cette exposition se manifeste aussi par la diversité des pratiques. Deux récents diplômés de la Villa Arson à Nice , tous deux Noirs et issus de la banlieue revendiquent leur attachement à la pratique picturale qui leur permet de dénoncer aussi le racisme subi pendant leurs études. Les peintures de Lassana Sare et Ibrahim Meïté Sikely hautes en couleurs jouent du rapport à l’enfance et à la culture populaire. Les sculptures de montagnes bleues cristallisées par Bojana Nikcelic dialoguent avec deux triangles extraits de structures d’empêchement du mobilier urbain anti-sdf , prélevés par Laurent Lacotte . Le même artiste traite de cette situation sociale avec Office , une pièce à protocole sous forme de photographie. On peut y voir un morceau de carton posé au sol d’une grande ville avec cette formule impérative Je suis absent. Appelez. Le numéro reproduit correspond à une ligne active où l’artiste répond aux appels et récriminations. La franco-gabonaise Myriam Mihindou présente trois tirages de sa superbe série Imu Iébembu ce qui évoque l’immatériel dans la langue maternelle de son père. Il est dommage que ces sombres tirages soient peu lisibles du fait de la présence d’un verre qui répercute tous les reflets. Elle y évoque le culte des ancêtres grâce à des lignes de vêtements coincés dans la terre.

L’une des révélations de cette proposition collective est le travail de deux artistes, Suzanne Husky et Stéphanie Sagot qui agissent sous le label Le nouveau ministère de l’agriculture. Elles performent différents rôles pour approcher des projets protéiformes qui dénoncent l’agrobusiness. Leur série de 22 aquarelles Eléments de langages - les actes montrent des personnalités de pouvoir comme Sarkozy, Tatcher, Poutine ou le pape François dans une opération de communication faussement écologique consistant à planter un arbre dans différentes situations.

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++INFO++

Les Tanneries 234. Rue des Ponts 45200 Amilly

"We are" Exposition jusqu’au 16 avril 2023

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