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La pêche à terre, portraits

À Terre, Exposition de Stéphane Lavoué (Prix Niépce 2018 de Gens d’Images) à la Galerie Dityvon, Université d’Angers

A terre
A terre
Le Prix Niépce, attribué par Gens d’Images, soutenu par la Bibliothèque nationale de France et Picto Foundation, a été créé en 1955 par Albert Plécy. Il distingue chaque année le travail d’un photographe confirmé, français ou résidant en France. En 2018, le prix Niépce a été attribué à Stéphane Lavoué. Connu pour ses portraits de commande - Libération, Le Monde, les comédiens de la troupe de la Comédie Française - et le conte photographique The Northeast Kingdom, Stéphane Lavoué expose la série "À terre" à la Galerie Dityvon de l’université d’Angers, en lien avec le festival de cinéma Premiers Plans.

Voir en ligne : http://www.univ-angers.fr/fr/vie-de...

Comme il le dit lui-même, à propos de L’Équipage, la première série réalisée au Nautilus à Penmarc’h - et à l’opposé des portraits de personnalités pour la presse, réalisés « contre leur volonté, malgré eux » -, il se veut passeur, transparent : « […] je fais des portraits avec les gens, je photographie rapidement en réajustant légèrement la position des corps, je dirige avec fermeté mais bienveillance et naturellement sans combat, les images prennent forme et cette fois c’est moi qui interromps la séance au bout de deux à trois minutes ».

Le propos est ciblé dès l’entrée de l’exposition. Face à face, un texte autobiographique d’intention et un plan large sur le port, la jetée, le ciel bleu sombre, chargé, un éclat de lumière sur le bassin et les proues des bateaux de pêche ; par-dessus la jetée, les vagues, comme dans un conte de terre et de mer, balaient le paysage de toupets d’écume : « En prenant comme fil rouge ce projet de ‘pêche à terre’ sur le Quartier Maritime du Guilvinec, j’ai d’abord cherché une forme photographique susceptible d’exprimer au plus juste les émotions qui avaient motivé [notre installation à Penmarc’h…] ».

Car c’est bien l’émotion d’une rencontre, d’une aventure humaine quiemporte le visiteur, le monde plus ou moins invisible des employés de marée qui découpent et préparent le poisson pour l’expédition et les commandes, des ouvriers des Frigos qui produisent la glace de conservation, des charpentiers et forgerons de marine, des mécaniciens qui entretiennent les moteurs des bateaux de pêche. Il y a Michel, Kilian, Lorie, Yannick, Patrick, Nathalie, Émilien, Éric…, des hommes et des femmes qui n’ont pas l’habitude d’être photographiés, dans leurs vêtements, leurs masques - quelquefois étranges - et leur environnement de travail, dans le bruit et les odeurs de poisson, de peinture ou de soudure, dans le froid et l’humidité, la pollution provoquée par le décapage des peintures de coques. Individuellement et en série, les portraits, au visage et à la dignité sculptés par la lumière, entre improvisation et direction de la pose par le photographe, évoquent des collections célèbres de portraits de métiers, mais le cadrage variable, l’attention portée aux regards dirigés vers l’appareil ou vers un hors champ intérieur ou extérieur, pétillants ou empreints de fatigue, traduisent l’intensité brève du moment de la prise.

L’accrochage propose une chronique en épisodes, au lexique singulier, composé d’un rythme de correspondances entre portraits, paysages et natures mortes, toute l’économie de la pêche à terre : la mer, sombre et moirée de couleurs et de contrastes, qui pourvoit aux emplois à terre, encadrée de portraits des employés de marée ; les charpentiers de marine, implantés entre les natures mortes d’ateliers à la chaude étrangeté ; les formes inversées du masque du forgeron et du créneau sur la mer ; les visages aux couleurs de peinture hollandaise entourant une photographie de jetée ; quelques portraits isolés ou regroupés… Le choix des rapprochements et des écarts crée une situation singulière d’intimité et d’inconnu, de temps, qui hésite entre la tradition et ce que le visiteur connait tant des histoires de marins que de l’économie de la poissonnerie, un temps, où, l’attention focalisée en récits multiples sur les assemblages de photographies, il est invité, le regard éveillé d’étrange familiarité, à imaginer la narration sensible du témoignage et de la mémoire d’un des derniers ports de pêche artisanale.

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++INFO++
À Terre, Exposition de Stéphane Lavoué (Prix Niépce 2018 de Gens d’Images), 25 janvier - 30 mars 2019. commissaire Lucie Plessis, Galerie Dityvon, Université d’Angers, 11 allée François Mitterrand, Bibliothèque Universitaire Saint-Serge (BUA), https://gensdimages.com/2018/05/18/stephane-lavoue-laureat-du-prix-niepce-2018. La série est visible sur le site de Stéphane Lavoué http://www.stephanelavoue.fr/.

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