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L’inconscient à fleur de peau

Une exposition du Mois Européen de la Photo à Dudelange

Katerina Jebb
Katerina Jebb
Dans le cadre du Mois Européen de la Photo au Luxembourg, au Centre d’Art Nei Licht de Dudelange, une approche post-lacanienne des « Mutations » est proposée par Danielle Ignitti et Christian Gattinoni sous le titre façon slogan « Faire la peau de l’inconscient ». Photographes et vidéastes s’y collent.

Voir en ligne : http://www.emoplux.lu/

Là est encore une fois revendiquée la fréquentation des artistes travaillant dans les parages des sciences humaines. Dans un accrochage subtil de la responsable des lieux, qui a exposé de nombreux plasticiens hommes et surtout femmes travaillant la place du corps, nous sommes d’abord confrontés aux poupées sexuelles de Katerina Jebb qui montre leur caractère profondément artificiel. En dehors de cette figure sociale du désir elle approche en vidéo une exploration scannée de la peau, d’une réelle sensualité, nous voici dans le vif du sujet. La manipulation idéologique des corps et des esprits se voit ensuite mise en couleurs par Isabelle Grosse traquant dans les coulisses des plateaux télévisuels les manœuvres des chauffeurs de salle. L’hystérie se joue à fleur de peau comme de cri programmé.

Les artistes eux-mêmes ne sont pas exempts de ces dressages de leurs corps à domestiquer dans une pratique aussi contraignante que la danse classique. Elina Brotherus dans une de ses toutes premières vidéo, inédite en France, se met en scène aux prises avec la voix off autoritaire d’une maîtresse à danser. Drôle et insolent.

Ce double caractère sexuel et social étant posé on peut déplorer que, dans son texte introductif, Gattinoni fasse référence à un auteur des plus douteux de la psychanalyse qui a notamment tenté d’y réintroduire les tests et qui approche de façon si tendancieuse l’art corporel. Si le concept de « moi-peau » peut parler aujourd’hui à un large public, l’illustration époustouflante qu’en donnent les transformismes corporels, vidéo de Laurent Goldring, n’ont rien de commun avec celui qui voulait régler ses comptes avec Lacan pour avoir psychanalysé sa mère.

Sinon dans sa constitution individuelle il n’est pas exclu que la peau soit l’objet de transformations, de parures, de péripéties et d’accidents Vera Weissgerber en dresse la partition colorée dans une installation dynamique. Du côté des expérimentations formelles qui redonnent vie à la surface de l’épiderme aux autres sens comme à la chaleur des corps Evelyne Coutas joue avec brio de ces traces corporelles. En dialogue et synergie les empreintes lumineuses des étreintes physiques sont donnés à deviner dans l’ombre complice des « coïts » de Frédéric Delangle interprétant le congrès amoureux du couple comme une sculpture charnelle.

Dans une manifestation européenne on peut regretter que le titre de l’exposition dans son jeu de mots très français reste intraduisible. Les œuvres elles-mêmes réussissent cependant à rendre compte d’un côté de ce règlement de compte avec l’inconscient comme de la tentative de retendre sur le bâti de l’image une synthèse visuelle des strates sensibles de la peau.

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Voir aussi l’article MUTATIONS plasticiennes et documentaires de C. Gattinoni, rubrique Précipités, Chroniques.

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