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ENTRETIEN AVEC HÉLÈNE NGUYEN-BAN, collectionneuse et galeriste

Elger Esser / Combray
Elger Esser / Combray
En avril 2015, Hélène Nguyen-Ban aux côtés de Victoire de Pourtalès crée VNH gallery, située à l’emplacement de l’ancienne galerie Yvon Lambert. Ce projet, né d’une longue amitié entre les deux jeunes femmes, apparaît comme l’aboutissement de la passion d’Hélène Nguyen-Ban pour l’art contemporain qu’elle collectionne depuis quinze ans. Une collection qui reflète son ouverture internationale. Mais si Hélène Nguyen-Ban vit entre Londres et Paris, c’est dans son vaste appartement situé dans le 7ème arrondissement de la capitale française qu’elle a choisie de conserver ses œuvres. C’est là que nous nous rencontrons.

Voir en ligne : www.vnhgallery.com/

Florence Andoka : Comment a débuté votre collection ? Y a-t-il des motifs ou des périodes spécifiques qui la structurent consciemment ? Hélène Nguyen-Ban : Collectionner était une activité parallèle à mon travail dans la mode, chez Louis Vuitton, puis Nina Ricci. J’ai commencé à acheter mes premières pièces il y a quinze ans. La première, je l’ai toujours dans mon salon : un portrait emblématique de la série Bloodline de Zhang Xiaogang. Ainsi, l’aventure a commencé par l’Asie. Née d’un père vietnamien, j’ai toujours été attirée par la culture de ce continent, où par chance mon travail me menait souvent. Si ma démarche de collectionneuse n’était pas a priori guidée par des thèmes, je m’aperçois avec le recul que mes œuvres fonctionnent en résonance au sein de deux grands ensembles : les portraits et l’art religieux au sens large. Pour l’art religieux, je voudrais citer Andres Serrano, dont le travail me touche particulièrement. Je possède plusieurs pièces de cet artiste. Le triptyque, Red Pope I-III en est un exemple. J’ai aussi acquis, il y a plus d’une dizaine d’année, « South Rose Window Lincoln Cathedral » de Damien Hirst. D’autre part, je ne me limite cependant pas à l’époque contemporaine, puisque je possède des antiquités religieuses de toutes époques et provenances.

FA : Faites-vous un lien entre les deux thématiques du portrait et du religieux ? HNB : Oui, au sens où l’intériorité d’un portrait peut rejoindre le caractère transcendant de la religion. Le visage est très important dans les cultures asiatiques : parce qu’il est un accès à l’intériorité, la pudeur impose qu’il reste toujours impassible. Mais cette impassibilité peut paradoxalement être chargée d’émotion…

FA : Je découvre dans votre intérieur des clichés de Robert Mapplethorpe, Jean-Baptiste Huynh, Andres Serrano, Hiroshi Sugimoto. La photographie semble être un médium qui traverse votre collection. HNB : Ce sont le plus souvent des œuvres qui ont le visage ou le corps pour sujet. Ce n’est cependant pas systématique, comme en témoigne cette pièce d’Elger Esser qui superpose les fragments d’une église romane. Le lien entre toutes ces images me paraît être un goût de l’épure, du retrait, de la beauté, même si cette notion est subjective. Jean-Baptiste Huynh est un artiste important dans ma collection. Il est devenu un ami. Collectionner est aussi une affaire de rencontres. Je ne l’envisage pas comme un simple calcul financier. Au fond, ce qui m’intéresse, est la singularité. L’émotion qu’une œuvre suscite en moi, pas sa valeur marchande. Lorsque l’on vit quotidiennement avec des œuvres, on ne peut pas acquérir des pièces que l’on juge médiocres, fussent-elles bien cotées. Quelque en soit l’auteur où la date de création, je suis en quête d’exception. Je le dis humblement, car encore une fois j’ai conscience de la relativité des goûts.

FA : Cela signifie-t-il que vous entretenez un rapport pérenne avec les œuvres que vous avez choisies ? HNB : Je n’ai revendu aucune pièce, et espère ne jamais avoir à le faire. Mes goûts sont solides, constants, même s’il arrive qu’une pièce me touche un peu moins avec le temps ou un changement de contexte.

FA : Vous êtes désormais galeriste. Comment en êtes vous arriver à faire ce choix ? HNB : Ouvrir une galerie est une façon de lier passion et travail. Il me semble qu’il s’agit là d’un vrai luxe. L’ouverture de VNH gallery est l’aboutissement d’un long processus. Je connais Victoire de Pourtalès depuis une dizaine d’années, mais cela ne fait que deux ans que nous nous consacrons à ce projet. Victoire vient de la galerie de Thaddaeus Ropac, moi du groupe LVMH. Deux grosses structures que nous avons eu envie de quitter pour nous consacrer à un projet plus personnel. Trouver un lieu a été difficile, et nous avons eu quelques déconvenues. Des pistes, longtemps poursuivies, n’ont pas abouti. C’est juste après un de ces échecs qu’Yvon Lambert nous a proposé de reprendre les locaux de sa galerie, rue Vieille du Temps, dans le marais. Si je tenais à m’associer avec Victoire, c’est que je crois d’une part à la complémentarité de nos profils, d’autre part que nos différences sont un atout pour un projet comme celui-ci. Nous échangeons beaucoup, nous confrontons nos points de vue. Quand nous arrivons à les rapprocher, c’est que l’idée est bonne.

FA : Pourriez-vous nous parler un peu de votre programmation ? Nous venons de présenter le travail de Pascal Marthine Tayou. Cette première exposition avait pour but de marquer symboliquement, comme un rite de passage, la transition de la programmation d’Yvon Lambert à la nôtre. Olivier Mosset et Mai-Thu Perret (deux artistes de génération différente) prendront sa suite au moment de la FIAC. Tous deux inaugureront l’espace re-configuré de la galerie.

FA : Pour terminer, quels liens faites-vous entre votre activité de galeriste et de collectionneuse ? HNB : Les deux se nourrissent d’une même passion pour l’art contemporain. L’expérience que j’ai accumulée en tant que collectionneuse me sert aujourd’hui en tant que galeriste. Durant quinze ans, j’ai eu la chance de voir travailler les plus grands galeristes. J’ai appris à leur contact. J’ai aussi rencontré des artistes, visité de nombreux ateliers. Je ne découvre pas le monde de l’art.

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