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Force est de constater que ce parti-pris est remarquable puisque la photographie de l’artiste belge n’en est pas vraiment une. Mais elle n’est pas non plus de la peinture. C’est une œuvre à la frontière, à la marge, oscillant entre l’abstrait, l’intangible et le concret, qui se déploie sur deux étages dans les salles du FRAC.
On se perd dans des instants sourds entre une image de mer étale, un corps nu presqu’abandonné, un bouquet de fleurs. On se heurte à des murs qui sont peut-être des écrans et quand une cloche sonne on ne l’entend pas. L’image n’est jamais noire, jamais blanche mais produit une infinie variété de gris, presque poudreux. Parfois, une photographie couleur surgit, laissant le spectateur un instant dérouté. La couleur pourrait, devrait, ramener à une réalité plus concrète. Il n’en est rien. Les images se superposent, s’imbriquent et chacun s’invite, s’invente (à) sa propre histoire.
Il n’y a, par la volonté de Dirk Braeckman , ni temps, ni lieux, simplement des images grand format contrecollées sur des cadres d’acier. Parfois, un cartel donne une série de lettres, une date (qui n’est pas la date de prise de vue, mais celle de production de l’œuvre), ou un morceau de phrase bien énigmatique (As i lie…). Pourtant tous ces moments, toutes ces images sonnent comme quelque chose de connu, de su, comme une évidence. Mais quelle évidence ? La nôtre ? Celle du photographe ? Ici, la photographie, une fois encore, revêt cet aspect menteur qui est son apanage. Découper le réel par le choix d’un cadrage, l’extraire de tout contexte pousse chaque spectateur à s’interroger sur sa propre vision de sa propre réalité. De quoi est-ce que nous nous souvenons quand nous ne nous souvenons de rien ? Dirk Braeckman joue de ça, de ce mensonge consenti, pour osciller entre concret et abstrait. A la fin, le regardeur ne peut ressortir que dérouté, mais charmé. Qu’a-t ‘il vu ? Impossible de le dire avec certitude, les évidences ne sont que possibles. Qu’a-t ’il retenu ? Tout et rien, parce que rien n’est si certain que ça, mais tout est ici.
Bien sûr, il lui reste la possibilité d’acheter le catalogue de l’exposition, mais ça ne suffira pas. Il ne pourra saisir l’essence des images présentées. Il faut se confronter aux œuvres remarquables de Dirk Braeckman, y venir et revenir sans cesse pour être enfin convaincu d’une chose : nous ne savons rien de ce que nous savons.
Évidences Possibles - Dirk Braeckman 28/01/2023 – 14/05/2023
FRAC Auvergne 6 rue du Terrail 63000 Clermont-Ferrand Mardi -Samedi 14h/18h Dimanche 15h/18h Entrée gratuite Contact : 04 73 90 50 00 – contact@fracauvergne.com